Disclaimer : Cet article a été publié à l’origine sur le webzine Bordelais Slapzine. Le but était de lier un fait d’actualité avec un jeu vidéo et parler de son traitement vidéoludique.
Vous en avez entendu parler :
Découvert en 1976, le virus Ebola est aujourd’hui la préoccupation principale d’institutions internationales comme l’OMS et l’ONU. Depuis le début officiel de l’épidémie en mars 2014, le virus a contaminé plus de 14 000 personnes dont 5 000 ont succombé.
Très localisée en Afrique de l’Ouest, cette épidémie a néanmoins débuté ces derniers mois son exportation par le biais des moyens de transport, générant une grande crainte dans les pays occidentaux.

Il n’y a, à l’heure actuelle, aucun vaccin. Seul un traitement expérimental a réussi à sauver quelques vies. Les premiers tests devraient débuter dès décembre pour une première vague de vaccination vers juin. En attendant l’épidémie persiste…

Maintenant, jouons ! :
Dans le monde vidéoludique, les concepts d’épidémie et de contamination sont souvent utilisés, mais jamais au centre du jeu en lui même. Les maladies à caractère pandémique sont fortement liées au background du jeu c’est-à-dire qu’elles font partie de l’histoire, du décor. La maladie est présente, visible, mais le joueur n’y pourra rien.
Il est vrai que d’un point de vue de gameplay, la maladie en elle-même n’est pas très intéressante. Comment intéresser le joueur à lutter contre quelque chose qu’il ne voit pas ? Certains développeurs ont trouvé leur bonheur avec l’utilisation de plus en plus commune de zombies ou autres monstres infectés pour personnaliser cette menace.
Dernièrement, on peut citer le jeu unanimement salué par la critique, The Last of Us (dont l’infection s’inspire d’un véritable champignon qui fait froid dans le dos : le Cordyceps), ou le petit nouveau d’une série de « classiques », Resident Evil 5 (où le virus est une souche d’Ebola soit dit en passant).

Rassurez-vous, on n’est pas là pour pratiquer la survie en terre contaminée dans un zombie-like. Non au contraire, le but du soft d’aujourd’hui est bel et bien la gestion d’une épidémie à l’échelle mondiale ni plus, ni moins.
Le jeu :
Fiche technique :
Plague Inc Evolved
Développé par Ndemic Creations.
Existe : En accès anticipé sur Steam depuis le 20 février 2014 (13,99 €) et en version allégée sur iOS (0,99cts) et Android (gratuit)
Synopsis : Plague Inc: Evolved est un terrifiant mélange entre jeu de simulation réaliste et hautement stratégique. Votre agent pathogène vient d’infecter le « Patient Zero » – vous devez désormais mettre un terme à l’histoire de l’humanité en développant une épidémie mortelle et globale, tout en vous adaptant contre chaque mesure prise par les humains pour se défendre.
Bactérie, virus, fungus, parasite. Tous les outils sont mis en main du joueur pour préparer son épidémie.
Pour notre première partie, nous avons créé une bactérie toute simple nommée SL4PZ1N3 (#autopromo). Une fois le pays du patient zéro déterminé (la France #chauvin), l’épidémie commence son oeuvre.

Tous les critères sont à prendre en compte. La richesse de la région, son climat, sa population et ses accès aux soins, ses frontières, ses modes de transport. Chaque pays a ses caractéristiques propres qui doivent être étudiées et utilisées.
Infecter un patient zéro c’est bien, mais notre but c’est quand même que la maladie se répande. Pour cela, et au gré de points ADN gagnés, le joueur doit augmenter sa transmission, ses symptômes et ses capacités. Rendant la maladie de plus en plus violente, contagieuse et résistante.

Le principal moyen d’exporter le virus sera bien sur les transports. Avions et bateaux permettent vite à notre petite bactérie d’atteindre les cinq continents et à « transmettre son amour »

Il faut savoir cependant être discret, une fois les premières morts suspectes et la maladie découverte, il faut être réactif. Une course contre la montre s’engage avec les chercheurs qui vont essayer d’éradiquer la pandémie et de vite mettre en place un vaccin. Tout est bon pour gagner : résister aux médicaments, développer une paranoïa entre les malades, intercepter les avions de chercheurs, anéantir le pays précurseur de la recherche. La date de sortie du vaccin ne cessera alors d’être avancée ou retardée. Il faut savoir être rapide et organisé, car une fois les frontières fermées, une simple petite colonie de 10,000 personnes isolées au Groenland peut vous faire perdre la partie.
Des évènements aléatoires pourront aussi vous faciliter la vie comme des compétitions sportives (JO, Coupe du Monde), des festivals et autres catastrophes naturelles.

506 jours après le patient zéro, le dernier survivant isolé dans les montagnes chinoises meurt dans d’atroces souffrances d’une maladie à la fois pulmonaire, cardiaque et neurologique. Ça y est, on a réussi. L’humanité est détruite. On a gagné ! … Enfin je crois.
D’accord, mais qu’est ce qu’on a appris ?
Sous ses allures de petit jeu indépendant, Plague Inc, a eu un succès (10 millions de téléchargements en 2013) et une influence certaine. À tel point que le créateur James Vaughan a été invité par le CDC (Centers for Disease Control and Prevention) pour « être félicité par la portée pédagogique d’un tel jeu et le CDC n’exclut pas de se servir de nouveaux supports comme les Jeux vidéos pour sa communication de prévention »

Et ce n’est pas tout. Dans une interview accordée à l’AFP, James Vaughan a déclaré que lorsque l’épidémie a débuté, ils ont observé une hausse de prés de 50 % des téléchargements quotidiens du jeu. Pour le papa de Plague Inc, « C’est la première fois que l’on voit un événement du monde réel avoir un impact sur les téléchargements ». Étant du coup, un peu mal à l’aise d’avoir du succès sur le dos de quelque chose d’aussi grave qu’une épidémie, il a aussitôt décidé de mettre à profit son média en insérant un message dans le jeu, encourageant les 35 millions de joueurs à soutenir les associations & oeuvres de charité luttant contre Ebola.
Dans une même optique, un autre évènement est à raconter : vous ne le saviez peut-être pas, mais le monde du jeu vidéo a connu une véritable épidémie virtuelle en 2005. Dans le MMORPG (pour Jeu de Rôle Massivement Multijoueur, celui ci permettant à un grand nombre de joueurs d’interagir dans le même monde) World of Warcraft, une instance de jeu appelé « Zul Gurub » possédait un « debuff », c’est-à-dire un malus pour le joueur, appelé « Sang vicié ». Il avait pour effet d’enlever de la vie à grande échelle aux joueurs qui participaient à ce donjon. Sauf que le malus qui aurait du être cloitré dans sa zone de jeu de haut niveau s’est répandu parmi les joueurs du monde virtuel par le biais des animaux de certains. Devenant une véritable maladie, elle se répandait par simple contact entre les avatars. Les joueurs périssaient à la chaine sans distinction, et même les PNJ (personnages non jouables) pouvaient transmettre ce malus.
Le comportement des joueurs pendant ces quelques jours de chaos total a été le même qu’il aurait été dans la vie réelle. Certains s’improvisant médecins soignaient d’autres joueurs dans des zones de quarantaines, les villes étaient alors désertes et jonchées de cadavres des personnages tombés par cette maladie du « Sang Vicié ». Alors que quelques joueurs s’amusaient à répandre cette « plaie virtuel » de leur plein gré, d’autres fuyaient les zones infectées et se cachaient dans l’immensité du monde du jeu, soucieux de ne pas mourir…virtuellement.
Troublant non ? La maladie virtuelle présente en effet, les mêmes caractéristiques et les mêmes effets qu’une vraie maladie. Tout cela a fortement intéressé des épistémologistes et les consultants en bioterrorisme qui ont étudié ce phénomène et pensent utiliser les MMORPG (Jeu de Rôle Massivement Multijoueur) à des fins de planification d’épidémies.
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